-----------CULTIVER LE CACAO DANS DES SAVANES
EST-IL BENEFIQUE POUR LES AGRICULTEURS-----------
En
Cote d’Ivoire le cacao se cultive dans les zones forestières au Sud, à l’Est et
à l’Ouest. Cette localisation de la cacao-culture entraîne le phénomène d’exode rural,
la ruée des populations active vers ces zones. La conséquence est que le
Sud est plus peuplé que le Nord et Centre. En plus, on a un défrichement abusif
de la forêt. Les cultures de rente
(café, cacao) existe dans quelques savanes arborés au Centre du pays. Les
plantations dans ces zones naturellement pas favorables au binôme café cacao
peuvent être développées par des systèmes d’agroforesteries testés au Cameroun
par des chercheurs du CIRAD (centre de coopération
internationale en recherche agronomique pour le développement) et leurs
partenaires camerounais, qui ont analysé le fonctionnement de cacaoyères, qui,
avaient des rendements similaires à ceux des plantations établies en forêt.
Les producteurs de ce pays ont cultivé la biodiversité pour transformer une savane
en cacaoyère productive et ont installé également les cacaoyers sur des savanes
dominées par une mauvaise herbe,
l’imperata (Imperata cylindrica). Comment parviennent-ils à convertir
ces savanes, quelles associations et successions de cultures ont-ils mises en
place pour atteindre ce résultat ?
Pour
répondre à ces questions, une équipe du Cirad et de l’Irad (institut de
recherche agricole pour le développement) a étudié les pratiques paysannes dans
la région de Bokito, où près de la moitié des cacaoyères sont plantées sur des
savanes (Juin 2013).
La première
étape consiste à éliminer l’imperata, un adventice particulièrement
nuisible pour les cultures. Pour ce faire, les agriculteurs sèment des palmiers
à huile ou plantent des cultures annuelles où l’ombrage de ces plantes fait disparaître l’imperata car étant une herbe elle a besoin de beaucoup de soleil
pour son développement (espèce héliophile).
Grâce aux palmiers à huile semés à haute densité, les
agriculteurs obtiennent, en 4 à 5 ans, un couvert dense, qui empêche la
repousse de l’imperata. La deuxième étape, ils réduisent ensuite le nombre des
palmiers et plantent alors des cacaoyers à raison de 1 500 plants par hectare,
ainsi que des arbres fruitiers comme l’oranger, le safoutier, l’avocatier et le
colatier. Ils préservent ou introduisent certains arbres forestiers pour
fournir l’ombrage nécessaire aux jeunes cacaoyers, mais aussi pour améliorer la
fertilité des sols. Pendant 2 à 3 ans encore, ils désherbent la parcelle
à la main jusqu’à ce que la cime des arbres forme un couvert continu.
L’autre méthode de lutte contre de l’imperata consiste
à semer, dans les parcelles, préalablement labourées manuellement, des cultures
annuelles à cycle court − arachide, courge, maïs. Au bout de 2 à 3 ans, les
agriculteurs plantent les cacaoyers et, comme dans le premier cas, des arbres
fruitiers et des palmiers à huile, tout en préservant certains arbres
forestiers. Les cultures annuelles sont associées aux espèces ligneuses pendant
encore 2 à 3 ans. Les agriculteurs gèrent ensuite leurs parcelles de manière à
maintenir un ombrage propice à la croissance des cacaoyers, en éliminant
certains arbres en surnombre et en remplaçant les palmiers abattus et les cacaoyers
malades ou morts. Le système agroforestier atteint ainsi progressivement son
équilibre et améliore la fertilité des sols (augmente sans apport d’engrais, la
teneur en carbone des sols est de 2,2 % dans les plantations âgées de 10 ans,
contre 1,7 % dans les savanes voisines ; elle atteint 3,1 % dans les
plantations de plus de 40 ans) ; la biodiversité de ces cacaoyères de
savane tend à progresser avec le temps : l’indice de Shannon-Weaver passe de
1,97 dans les plantations de moins de 10 ans à 2,26 dans celles de plus de 40
ans. Les chercheurs ont ainsi recensé, dans un échantillon de 47 cacaoyères,
près de 5 000 arbres associés appartenant à 67 espèces. Ces systèmes
agroforestiers permettent aux agriculteurs de restaurer les sols dégradés des
savanes et de produire, sans aucun intrant et dans des conditions peu
favorables à la culture du cacaoyer, autant de cacao marchand que les
cacaoyères
de forêt.
Florence KPLA
Master 2 Botanique
chistyflow@hotmail.fr